Le 6 juin dernier, se tenait à Bâle la 1ère Assemblée générale de l’Association de Banques Privées Suisses. Ce fut l’occasion pour son Président, Christoph B. Gloor, de revenir sur les raisons qui ont motivé la création de cette association et le changement de paradigme qui s’impose à la place financière suisse. C’est l’opportunité pour amGroup de donner la parole à Grégoire Bordier, Associé de Bordier & Cie, 5ème génération, attaché à son statut de banquier privé et membre de cette nouvelle association.

Paris, le 1er juillet 2014

Dans un environnement qui change, préserver l’ADN de la banque privée suisse

C’est sans nul doute la vertu première du mouvement associatif qui se maintient en Suisse, alors que les établissements, selon leur statut, leur histoire, leur culture, ou leur modèle d’affaire, révèlent des intérêts qui divergent de plus en plus. En témoigne l’émergence de deux associations aux acronymes identiques (ABPS) : l’Association de Banques Privées Suisses et l’Association des Banquiers Privés Suisses, nées à la suite du démantèlement du Groupement des Banquiers Privés Genevois lorsque 3 de ses 4 membres ont changé de forme juridique, se transformant en société anonyme. La première a pour mission de défendre les intérêts professionnels des banques suisses en mains privées spécialisées en gestion de fortune, la seconde a pour objectif de défendre la marque et la philosophie des banquiers privés « indéfiniment responsables des avoirs de leur clientèle ». La création de l’Association de Banques Privées Suisses qui inclut les Banques qui ont changé de forme juridique plutôt que l’intégration de celles-ci dans l’association des banques de gestion permet de garder ces deux associations indépendantes au sein de l’Association suisse des banquiers (ASB) tout en conservant leur poids respectif. Cela confère à ces dernières un certain pouvoir doublé d’un dynamisme positif. Ce ne sont pas les sujets qui manquent à l’heure de la mise en place de directives internationales telles que le nouveau standard mondial sur l’échange automatique d’informations de l’OCDE, le FATCA américain ou encore MIFID, à l’échelle de l’Union européenne. Et dans ce contexte contraint par le réglementaire, il est un thème qui perdure, celui de la sphère privée car à la défendre, il y a toujours une carte à jouer ; s’il convient d’admettre que sa défense s’inscrit dans un périmètre plus limité, pour autant dans un contexte de très forte internalisation de la clientèle, elle prend tout son sens avec des pays peu ou pas du tout démocratiques. Sans compter que l’extension du secret professionnel au médecin ou à l’avocat pose la question suivante : où le culte de la transparence s’arrête-t-il ?

La transformation de la place financière suisse est inéluctable

La concomitance de la crise économique, de la montée en puissance de la réglementation et du changement de clientèle amène les acteurs suisses à repenser leur modèle d’affaires même si leurs acquis restent valides, à savoir : le type de gestion proposé, une capacité à traiter tous les marchés et toutes les monnaies, l’esprit d’innovation qui les anime dans un pays qui s’est toujours distingué par sa très grande stabilité politique et législative. Tous les établissements ont compris l’évolution vers la transparence et règlent ainsi le passé ; mais quid de l’avenir ? Comment délivrer la valeur ajoutée exigée désormais par une clientèle ‘tax compliant’ ? Un challenge difficile à relever en particulier pour les banques qui utilisaient la plate-forme suisse pour développer une clientèle internationale non fiscalisée. Certaines consolident leurs positions, d’autres s’en vont. Parmi leurs consœurs suisses, certaines font logiquement le choix d’une gestion dite onshore : c’est le cas de banques qui se caractérisent par un ancrage local et une grande proximité avec leurs clients telles que les banques cantonales. Mais le private banking offshore suisse, bien sûr fiscalisé, reste un atout pour la place : il appartient à ses acteurs, dont Bordier & Cie, de reprendre le ‘lead’ sur l’innovation et démontrer leur capacité à se réinventer, même dans un contexte de concurrence très directe avec les autres places offshore. En effet, au nombre des centres off-shore la Suisse peut se prévaloir d’être un pôle d’excellence à la hauteur de Londres, pour ce qui est de l’Europe, de Miami et New York, pour la zone Amérique ou encore de Singapour et Hong Kong - voire Dubaï ? - pour la zone Asie. Et ce n’est pas faire injure au Luxembourg qui ne figure pas dans cette liste, mais à qui il convient de reconnaître son attractivité incontestable pour une gestion transfrontalière intra Europe. Le Grand Duché a su à la fois prendre le leadership dans la domiciliation de fonds de placement - développant une expertise forte dans la structuration des fonds UCITS notamment -, tirer parti de son intégration européenne et promouvoir un cadre réglementaire faisant la part belle à une flexibilité avérée. Mais c’est une clientèle paneuropéenne qui s’inscrit naturellement dans le cœur de cible des acteurs de la place luxembourgeoise, et non une clientèle offshore composée d’investisseurs fortunés natifs d’Amérique latine ou d’Asie que la place suisse peut, pour sa part, prétendre attirer. Ce qui n’exclut pas que les banques privées suisses doivent aussi consolider leur présence au niveau de l’Union Européenne.  

Pour Bordier & Cie, le futur s’inscrit dans cette dynamique à la fois paneuropéenne et internationale

Plus que jamais attaché à son statut de banquier privé indéfiniment responsable, car toujours adapté à ses ambitions et à sa taille, Bordier & Cie réaffirme également son positionnement de ‘pure player’ : la gestion privée est son seul métier. Aussi, quand nous enrichissons notre offre d’un volet ‘Prévoyance professionnelle’, c’est parce que, suite à un changement de la réglementation suisse il y a quelques années,  il y avait un avantage fiscal pour le client en activité professionnelle à développer sa prévoyance car il était alors en franchise d’impôt ; c’est donc un outil supplémentaire dans un contexte d’allègement fiscal pour éviter que l’impôt ne grève le montant de la retraite méritée. Plus généralement, parce que la fiscalité est devenue un élément majeur dans l’élaboration d’un portefeuille, nous avons réalisé les investissements requis pour être en mesure de produire le reporting fiscal de notre clientèle suisse ainsi que les différents relevés fiscaux requis pour notre clientèle internationale. A ce titre, le back-office crée de la valeur et peut constituer un atout compétitif. Sur le front européen, Bordier & Cie est présente sur deux places, Paris et Londres. La première a démontré l’intérêt d’un développement local : la croissance parle d’elle-même et nous constatons que nous avons un élément différenciateur qui plaît. A partir de Paris, nous nous déployons aussi en Belgique et à Luxembourg en LPS, un passeport que nous utiliserons également bientôt pour offrir nos services en Espagne. Quant à notre pôle londonien, il nous permet notamment d’accueillir et de suivre les clientèles qui se déplacent, par exemple celle qui sous la pression fiscale décide de se domicilier à l’étranger.

Loin de prendre un nouveau départ, nous poursuivons donc notre trajectoire et en restant indépendant, nous avons une vraie carte à jouer, à l’image d’un family officer qui aligne ses intérêts sur ceux de ses clients.